Georges Franju signe avec «Le Sang des Bêtes» son premier court-métrage documentaire, sorti en 1949.
D’abord reconnu comme co-créateur de la cinémathèque française qu’il monte en 1936 avec Henri Langlois, Georges Franju annonce très vite son goût pour une mise en scène à cheval entre le réalisme poétique, l’expressionnisme et le documentaire.
Ce premier court-métrage laisse le spectateur devant la violence et la répulsion des images des abattoirs de Vaugirard et de La Villette dans les années d’après guerre.
Le film donne déjà à voir l’essence de la mise en scène de Franju : l’introduction nous présente un Paris poétique emprunt du style de Carné, Duvivier ou Renoir… pour nous plonger, une fois à l’intérieur de l’abattoir dans un film d’une violence surréaliste projetant face à face la neutralité d’un commentaire documentaire et l’image expressionniste des corps dépecés.
Ce qui fera dire au cinéaste «ce n’est pas le fantastique qui m’attire, c’est l’insolite» tient dans un profond désir de montrer à l’image ce que nous cache le visible, cette part d’irréalité tout entière contenue dans le réel :
« nous avons cherché dans notre film à restituer au réel documentaire son apparence d’artifice et au décor naturel son aspect propre de décor « planté ». Pour y parvenir, nous avons cadré les bâtiments à pleine façade (moulin de Pantin) ou bien choisi des maisons profilées (pont de Flandre) en évitant toute épaisseur » (Georges Franju)
Georges Franju nous montre, dans la lignée de Jean Vigo, qu’il n’y a pas qu’une seule manière de filmer le réel, loin de là, qu’au cinéma l’objectif est avant tout au service du cinéaste qui nous propose un regard, son regard.